Proposition de loi visant à garantir la maintenance des défibrillateurs automatisés externes
Chaque année, entre 40 000 et 50 000 personnes sont victimes d’une mort subite. L’utilisation d’un défibrillateur dans les cinq minutes permet de donner à la victime 50 % de chance de survie, quand celle‑ci en perd 10 % chaque minute passée sans massage cardiaque. Afin de sauver des vies » l’éducation de la population au massage cardiaque est primordiale et doit rester associée au déploiement des défibrillateurs externes. » Pourtant, alors que le Président de la République souhaitait que 80 % de la population française soit formée aux gestes de premiers secours en 2022, en 2023, seuls 40 % des Français l’étaient.
Concernant les défibrillateurs, en 2007, un décret permettait de démocratiser l’utilisation du défibrillateur en permettant son utilisation par les personnes non médecin. En 2018, une loi déterminait les types et catégories d’établissement recevant du public qui avaient obligation de s’équiper, et prévoyait que les propriétaires de ces établissements soient tenus de s’assurer de la maintenance du défibrillateur automatisé externe (DAE).
Néanmoins, malgré ces avancées, qui ont notamment permis de faciliter l’accès aux défibrillateurs par tous en les déployant massivement en France, le problème de la maintenance de ces dispositifs a été récemment mis en lumière. En effet, selon la société Matecir Defibril, qui a réalisé un audit de maintenance pendant deux ans, entre 2021 et 2023, sur 6 021 DAE, ont été identifiés des problèmes de fonctionnement sur près de 60 % d’entre eux. Il s’agit notamment, pour plus de 32 % des DAE, de consommables périmés, pour presque 8 %, d’un mauvais stockage, et pour plus de 3 % d’une pile de sauvegarde périmée. Si l’on rapporte ces chiffres aux 500 000 défibrillateurs installés dans les lieux publics en France, ce sont un tiers des DAE qui présenteraient une anomalie où seraient hors service.
Ce manquement aurait pu notamment coûter la vie à M. Yves Gilles, maire de Brimeux dans le Pas‑de‑Calais, alors qu’il faisait un arrêt cardiaque et que le défibrillateur, prêt à être utilisé, a indiqué un défaut de batterie. Inutilisable, il a fallu aux témoins en trouver un nouveau qui, lui, a heureusement fonctionné. Comme l’indique M. Gilles lui‑même : « Le premier système a eu un défaut de maintenance, un simple problème matériel qui aurait pu me coûter la vie. »
Pourtant, la maintenance des DAE est obligatoire. Comme l’indique l’article R157‑4 du code de la construction et de l’habitation, « Le propriétaire du défibrillateur veille à la mise en œuvre de la maintenance du défibrillateur et de ses accessoires et des contrôles de qualité prévus pour les dispositifs médicaux qu’il exploite. La maintenance est réalisée soit par le fabricant ou sous sa responsabilité, soit par un fournisseur de tierce maintenance, soit, si le propriétaire n’est pas l’exploitant, par l’exploitant lui‑même conformément aux dispositions de l’article R. 5212‑25 du code de la santé publique. » L’article R. 5212‑25 prévoit quant à lui que « L’exploitant veille à la mise en œuvre de la maintenance et des contrôles de qualité prévus pour les dispositifs médicaux qu’il exploite. La maintenance est réalisée soit par le fabricant ou sous sa responsabilité, soit par un fournisseur de tierce maintenance, soit par l’exploitant lui‑même. »
Pourtant, les chiffres cités précédemment montrent que cette maintenance n’est pas correctement mise en place.
Dans un article publié en mai 2024, l’association ARLoD (association pour le recensement et la localisation des défibrillateurs) indiquait vouloir une loi obligeant les exploitants à assurer le bon fonctionnement des défibrillateurs, à l’image de ce qui est obligatoire pour les extincteurs. L’article MS 38 de l’arrêté du 25 juin 1980 portant approbation des dispositions générales du règlement de sécurité contre les risques d’incendie et de panique dans les établissements recevant du public (ERP) précise en effet qu’« Un extincteur doit faire l’objet d’une vérification annuelle et d’une révision tous les dix ans par une personne ou un organisme compétent. Il doit être marqué d’une étiquette clairement identifiable apposée par la personne ou l’organisme ayant réalisé cette dernière. Les années et les mois des vérifications doivent apparaître sur l’étiquette. Un plan d’implantation des extincteurs et un relevé des vérifications doivent être portés au registre de sécurité. »
Alors qu’il s’agit de nouveau de mesures réglementaires, l’objectif de la présente proposition de loi est de préciser le principe de la maintenance des défibrillateurs dans la loi afin que les mesures qui relèvent du domaine réglementaire correspondent au mieux aux besoins, et d’inscrire de nouvelles obligations notamment pour les exploitants, les fabricants, et les organismes de maintenance, afin d’établir un meilleur suivi des DAE.
Aussi, l’article 1er vise à préciser que l’organisme chargé de collecter les informations et d’alimenter la base de données nationale relative aux lieux d’implantation et à l’accessibilité des défibrillateurs automatisés externes reçoit notamment comme information de la part des exploitants de DAE, dans un délai d’un an, le nom du fabricant. Cette mesure permettra d’avoir un meilleur suivi des appareils. Par ailleurs, cette information doit également contenir des informations concernant les composants et consommables des DAE. En effet, il semble qu’il existe des problématiques de maintenance du fait d’un manque de connaissance des durées de vie de ces consommables, et notamment des piles internes. Ces dernières sont présentes dans 90 % des DAE, ont une certaine durée de vie et peuvent être changées ou non en fonction du modèle du défibrillateur. Enfin, l’article 1er prévoit que le recensement du défibrillateur soit effectué au maximum un an après son installation et que l’arrêté prévu détermine également les sanctions en cas de manquement. En effet, si aujourd’hui les exploitants doivent transmettre ces données, il semble que sur les 500 000 défibrillateurs installés en France, environ 120 000 soient recensés (à date du 15 décembre 2024).
L’article 2 précise que les DAE doivent être accessibles et faciles d’accès en permanence. Il vise également à mieux encadrer la maintenance en précisant qu’il doit s’agir d’un contrôle effectif des appareils (afin de bien prévoir des visites sur site et non pas d’une maintenance à distance des appareils), et précise par qui celle‑ci peut être réalisée. Il prévoit également que les modalités de la maintenance soient précisées par décret, et que le non‑respect de ces modalités soit sanctionné. Étant donné l’état actuel du parc, il faudrait prévoir une maintenance annuelle, et, comme pour les extincteurs, qu’un plan d’implantation des DAE soit installé dans les établissements. Enfin, l’article 2 vise à mieux encadrer les organismes qui sont reconnus compétents pour effectuer la maintenance de ce dispositif médical particulier de classe 3 qu’est le défibrillateur automatisé externe.
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