Proposition de loi visant à permettre aux propriétaires décédés de reposer avec leurs animaux de compagnie

En France, une famille sur deux détient au moins un animal de compagnie. Ces animaux sont désormais considérés comme des membres à part entière de la famille et certains citoyens souhaitent même qu’ils reposent auprès d’eux après leur décès.

 

Cela est possible dans plusieurs pays européens mais impossible en France.

 

La présente proposition de loi est le fruit d’un travail transpartisan engagé lors de la précédente législature par Loïc Dombreval et une vingtaine de députés de toutes les sensibilités politiques. Il s’agit aujourd’hui de poursuivre cette démarche législative en faveur d’une demande sociétale qui est tout à fait légitime et respectable.

 

Cette proposition de loi permettra en effet à tout particulier, qui énonce expressément ce choix de son vivant, lors de son inhumation dans un cimetière communal, de faire entreposer à ses côtés, au sein de son cercueil, avant la mise en bière, l’urne cinéraire de ses animaux, comme tout autre objet qu’il est déjà possible d’entreposer dans le cercueil.

 

Ce texte permettra également à tout particulier ayant choisi la crémation, de pouvoir faire placer ses cendres auprès de celles de ses animaux de compagnie dans un cimetière animalier, une pratique déjà légale en Suisse, en Allemagne ou encore au Royaume‑Uni.

 

Actuellement, en vertu des articles L. 2223‑3 et L. 2223‑13 du code général des collectivités territoriales, la sépulture dans un cimetière communal est due aux seules personnes. Le maire ne peut donc y autoriser l’inhumation d’un animal ou de ses cendres, demandée par une famille ou un propriétaire de caveau.

 

C’est ainsi que le Conseil d’État a justifié l’interdiction faite à un concessionnaire de caveau de s’y faire inhumer avec son chien en se fondant sur la notion de dignité des morts (Conseil d’État, 17 avril 1963, Blois). Cette notion impliquerait, selon cette jurisprudence, de séparer strictement les espaces dédiés à l’inhumation des hommes et des animaux de compagnie.

 

À ce jour, l’article 16‑1‑1 du code civil énonce que « le respect dû au corps humain ne cesse pas avec la mort ». Puis, il précise que « les restes des personnes décédées, y compris les cendres de celles dont le corps a donné lieu à crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence ».

 

Concernant le principe de respect dû au mort. Au sein du code pénal, la section IV du chapitre V du titre II, intitulé « Des atteintes au respect dû aux morts », débute par un article 225‑17 qui dispose que « toute atteinte à l’intégrité d’un cadavre, par quelque moyen que ce soit, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ». La notion de respect dû aux morts consiste donc en l’interdiction de toute atteinte à son intégrité.

 

Concernant ce principe de dignité. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 27 juillet 1994, a déduit du préambule de la Constitution de 1946 le principe, à valeur constitutionnelle, de « sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d’asservissement et de dégradation » (Cons. const. 27 juill. 1994, n° 94‑343/344 DC). La notion de dignité due à la personne humaine, qui s’applique également aux personnes décédées, implique donc l’interdiction de toute forme d’asservissement ou de dégradation du cadavre ou des cendres.

 

Enfin, concernant le principe de décence. Du fait que le législateur n’a pas défini le principe de décence, cette notion est par nature évolutive et il appartient donc au juge de caractériser et d’apprécier cette notion en fonction des habitudes sociales du moment.

 

Ces notions expliquées, il nous paraît toujours inconcevable qu’en 2022, la France ne permette pas aux citoyens souhaitant reposer avec leurs animaux, de le faire dans un cadre strictement défini, qui permettrait de respecter les principes de respect et de dignité dus aux morts et de décence.

 

En effet, permettre à nos concitoyens de reposer avec leurs animaux n’est contraire :

– ni au principe de respect dû aux morts car aucune atteinte à l’intégrité des corps humains et des cendres humaines ou animales ne serait permise ;

– ni au principe de dignité due aux morts car aucune forme d’asservissement ou de dégradation des corps ou des cendres ne serait permise ;

– ni au principe de décence car c’est une volonté croissante de nos concitoyens de reposer auprès de leurs animaux et d’autant moins que cela se déroulerait dans un cadre strictement défini.

 

Enfin, il est important de rappeler que l’article 433‑21‑1 du code pénal précise que : « toute personne qui donne aux funérailles un caractère contraire à la volonté du défunt ou à une décision judiciaire, volonté ou décision dont elle a connaissance, sera punie de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende ».

 

Par conséquent, si un citoyen énonce expressément et librement sa volonté de reposer avec son animal après son décès, sa volonté doit être respectée et le respect de cette volonté ne porte pas atteinte à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publique, ou encore à la protection des droits et libertés d’autrui.

 

Par son article unique, la présente proposition de loi prévoit de compléter le code général des collectivités territoriales et le code rural et de la pêche maritime pour permettre à nos concitoyens de reposer, après leur décès, avec leurs animaux.

 

Tout d’abord, le nouvel article L. 2223‑12‑2 du code général des collectivités territoriales permettra à tout particulier, lors de son inhumation dans un cimetière communal, de faire entreposer à ses côtés, au sein du cercueil, avant la mise en bière, l’urne cinéraire de ses animaux.

 

Il est déjà admis par la coutume de placer des objets dans le cercueil avant la mise en bière. Néanmoins, actuellement, aucun texte clair et précis ne détaille la liste des objets autorisés ou interdits pouvant être placés dans le cercueil d’un défunt, avant sa mise en bière. Cette situation entraîne des ruptures d’égalité entre nos concitoyens, certains se voyant autoriser la mise d’une ou plusieurs urnes cinéraires animales dans leur cercueil avant la mise en bière alors que d’autres non.

 

Ce nouvel article vient donc combler ce flou juridique et permettra de rétablir une égalité de pratique entre tous nos concitoyens.

 

Par ailleurs, le nouvel alinéa 4 de l’article L. 2223‑18‑2 du code général des collectivités territoriales et le nouveau chapitre V du titre II du livre II du code rural et de la pêche maritime permettront aux défunts ayant choisi l’incinération, de pouvoir faire placer leurs cendres auprès de celles de leurs animaux dans un cimetière animalier, une pratique déjà légale en Suisse, en Allemagne ou encore au Royaume‑Uni.

 

Actuellement, il existe déjà en France une trentaine de cimetières animaliers, majoritairement détenus par des personnes privées.

 

Néanmoins, ces structures n’ont actuellement aucune existence législative et font l’objet d’un encadrement principalement lié à la prévention des risques sanitaires et environnementaux s’inspirant, en l’absence de texte, des dispositions applicables aux cimetières communaux.

 

Afin de mettre fin à ce vide juridique, de permettre à ces structures de bénéficier d’un encadrement légal défini, et surtout, de permettre aux défunts de reposer avec leurs animaux, le nouvel alinéa 4 de l’article L. 2223‑18‑2 du code général des collectivités territoriales permettra aux défunts de pouvoir légalement, après avoir déclaré expressément leur souhait, faire reposer leurs cendres dans un « cimetière animalier ».

 

En conséquence, le nouveau chapitre V du titre II du livre II du code rural et de la pêche maritime permettra la création d’un nouveau chapitre dédié à ces cimetières.

 

Le nouvel article L. 225‑1 dudit code donne une existence légale aux cimetières animaliers, et le nouvel article L. 225‑2 dispose qu’un espace réservé aux concessions réunissant dans une même sépulture les cendres d’un défunt et celles de ses animaux de compagnie pourra être prévu au sein de ces cimetières.

 

L’ensemble de ces nouvelles dispositions ne vise absolument pas à mettre à la charge des communes ces structures déjà existantes. Ces dispositions ne feront donc pas peser de nouvelles charges sur nos communes.

 

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