Proposition de loi visant à renforcer l’efficacité de la procédure de reprise des logements abandonnés par le locataire

Le « départ à la cloche de bois », ou abandon du logement par le locataire, constitue un phénomène de plus en plus répandu, dont la gestion pour le propriétaire s’avère longue et complexe. Cet abandon de logement est caractérisé quand le locataire quitte son logement sans respecter de préavis et surtout, sans alerter le propriétaire.

 

La présente proposition de loi, accompagnée de mesures réglementaires, vise à réduire, en moyenne, de 9 à 3 mois la procédure de reprise de logement abandonné par le locataire.

 

L’abandon de logement, de plus en plus fréquent, condamne le propriétaire à engager une procédure judiciaire. En 2023, environ 5 000 procès‑verbaux ont été dressés par des huissiers de justice pour des cas d’abandon de logement. À titre de comparaison, les squats, c’est‑à‑dire lorsqu’un individu occupe sans droit ni titre un logement, pourtant beaucoup plus médiatisés, ne représenteraient qu’une centaine de cas par an. Dans ces deux cas de figure, la conséquence est néanmoins la même : le propriétaire bailleur se retrouve sans loyer, et surtout sans possibilité de récupérer son logement avant de nombreux mois.

 

Car le seul départ du locataire du logement ne suffit pas à résilier le bail. D’ailleurs, si le propriétaire tentait de remettre en location un logement dont le bail n’est pas résilié et sans respecter la procédure, il s’exposerait à de lourdes sanctions judiciaires pour violation de domicile.

 

Une procédure de reprise d’un logement abandonné, souvent longue et coûteuse, doit alors être lancée par le propriétaire. La présente proposition de loi vise principalement à réduire ces délais, permettant ainsi de gagner jusqu’à 6 mois de délai pour la remise du logement sur le marché.

 

La procédure de reprise d’un logement abandonné par le locataire a été instaurée par la loi dite « Béteille » n° 2010‑1609 du 22 décembre 2010, qui a créé l’article 14‑1 de la loi du 6 juillet 1989. Il s’agit d’une procédure visant à reprendre rapidement un logement laissé vacant par un locataire qui, généralement en situation d’impayés ou pour diverses autres raisons, n’a pu ou voulu mettre en place les formalités légales d’état des lieux de sortie et de remise des clefs au propriétaire.

 

Le décret n° 2011‑945 du 10 août 2011 relatif aux procédures de résiliation de baux d’habitation et de reprise des lieux en cas d’abandon a précisé la procédure d’obtention de l’ordonnance de reprise du bien, après mise en demeure du locataire.

 

Ainsi, le bailleur doit en premier lieu constater l’abandon de logement : pile de courriers qui s’entassent dans la boîte aux lettres, appels ignorés, absence de paiement des loyers… Il doit ensuite « charger un commissaire de justice de délivrer au locataire une mise en demeure de justifier qu’il occupe bien le logement ». Puis, si ce dernier ne réagit pas au bout d’un mois, le commissaire de justice mandaté peut pénétrer dans le logement en présence de deux témoins pour constater l’abandon. Enfin, le propriétaire devra saisir le juge des contentieux de la protection, qui peut alors prononcer la résiliation du bail.

 

Issue de la pratique et consacrée par la loi, cette procédure est néanmoins considérée comme une procédure « accélérée », en ce sens qu’elle évite au propriétaire la procédure traditionnelle d’expulsion, alors même que le locataire a quitté les lieux sans en informer le propriétaire, et que les délais qui lui sont habituellement accordés pour permettre son maintien dans les lieux n’ont plus de raison d’être.

 

Mais bien que cette procédure soit plus rapide qu’une procédure d’expulsion, certains obstacles à sa pleine efficacité ont été identifiés. En outre, à l’heure actuelle, cette procédure n’est applicable qu’aux baux d’habitation de locaux vides, bien qu’ils ne soient pas les seuls touchés par ces départs « à la cloche de bois ».

 

En premier lieu, même si la procédure d’obtention de l’ordonnance de reprise du bien est plus rapide que la procédure d’expulsion, elle nécessite tout de même en moyenne 6 mois, et jusqu’à un an selon les territoires et l’encombrement des tribunaux.

 

Pendant ce délai, le bien n’est pas remis sur le marché locatif, et ne peut donc pas être reloué immédiatement.

 

Autre conséquence, de nombreux bailleurs, qu’ils soient publics ou privés, se retrouvent alors sans loyer, ce qui conduit à des difficultés financières évidentes.

 

La situation actuelle du secteur du logement et du marché de l’immobilier, qui traversent une grave crise, notamment du fait du manque de logements disponibles, doit nous inciter à trouver des solutions simples, faciles à mettre en œuvre. La simplification des procédures est un moyen efficace pour que les logements vacants puissent être remis sur le marché locatif le plus rapidement possible.

 

Ainsi, la présente proposition de loi a pour objectif de réduire le délai accordé au locataire pour justifier de l’occupation du logement à 15 jours au lieu d’un mois, afin d’accélérer et simplifier la procédure de récupération d’un logement abandonné et, in fine, permettre la remise en location du bien le plus rapidement possible.

 

Comme cela a été décrit précédemment, la mise en demeure d’avoir à justifier de l’occupation du logement accorde au locataire un délai d’un mois pour se manifester.

 

En pratique, cette mise en demeure a lieu lorsque des indices sérieux et concordants laissent penser à un abandon manifeste (impayés de loyers, boîte aux lettres pleine non relevée, volets fermés depuis plusieurs semaines, témoignages de voisins…).

 

Dès lors :

– Soit l’absence du locataire n’était que momentanée et il occupe encore réellement les lieux : on peut estimer qu’il ne manquera pas de se manifester immédiatement auprès de son propriétaire ou du commissaire de justice auteur de la mise en demeure ;

– Soit il a effectivement abandonné le logement, sans procéder aux formalités légales obligatoires de congé, d’état des lieux et de remise des clefs, et la réduction du délai à 15 jours n’aura que peu d’impact sur le locataire ; elle sera en revanche utile au propriétaire qui pourra récupérer son logement plus rapidement.

 

Par ailleurs, la présente proposition de loi vise également à étendre le champ d’application de la procédure de reprise des logements abandonnés aux baux meublés ainsi qu’aux baux mobilités.

 

À l’heure actuelle, la procédure de reprise des locaux abandonnés par le locataire n’est possible que s’agissant des locaux d’habitation donnés à bail dans le cadre du titre Ier de la loi du 6 juillet 1989 (bail d’habitation des locaux vides).

 

Dans le cadre d’un bail meublé ou d’un bail mobilité, cette procédure n’est pas applicable. Ainsi, aujourd’hui, en cas d’abandon d’un logement donné à bail meublé ou bail mobilité par le preneur, sans que celui‑ci n’ait donné congé au bailleur selon la procédure de remise des clefs et d’état des lieux, ce dernier ne peut procéder à la reprise du bien, même s’il dispose d’indices lui permettant de penser que l’habitant a définitivement quitté les lieux. Dans ce cas, il doit procéder à une procédure d’expulsion par saisie du juge, procédure longue et coûteuse.

 

L’article 1er de la présente proposition de loi réduit donc le délai visé à l’article 14‑1 alinéa 3 de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986 à 15 jours au lieu d’un mois.

 

Les articles 2 et 3 rendent la procédure prévue à l’article 14‑1 de la loi du 6 juillet 1989 applicable aux baux meublés et mobilité, en ajoutant la mention de cet article dans les titres de la loi traitant de ces baux.

 

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