Proposition de résolution visant à inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes

L’entité militaire privée Wagner est apparue pour la première fois en 2014 dans le contexte de l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie et du déclenchement de la guerre dans le Donbass. Fondée par un ancien militaire, Dimitri Outkine, financée et dirigée par l’oligarque russe Evgueni Prigojine, le groupe Wagner est une société fantôme dépourvue de personnalité juridique.

 

Les combattants du groupe Wagner ont apporté un soutien au régime autoritaire de Bachar El‑Assad dans sa répression violente à la suite du soulèvement de 2011, au travers d’entraînements mais également d’opérations de combat direct. Au cours de son activité en Syrie, le groupe s’est illustré par plusieurs actes de barbarie, dont des exécutions sommaires mises en ligne sur Internet.

 

Le groupe Wagner s’est par la suite implanté dans plusieurs pays d’Afrique, cherchant à profiter des situations de troubles politiques, voire à les créer pour mieux servir ses intérêts. Ainsi, ses mercenaires ont notamment opéré en Libye, déchirée par des combats entre factions rivales. Implanté au Soudan en soutien au président Omar al‑Bashir, actuellement inculpé par la Cour Pénale Internationale pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide, le groupe Wagner est également très présent en République Centrafricaine. Dans ce pays, où son intervention s’est progressivement transformée d’un rôle de soutien et d’entraînement à un rôle de combat direct, plusieurs experts de l’ONU ont attesté des multiples exactions commises par les mercenaires de Wagner contre la population civile.

 

Outre le Mozambique, où son déploiement a été de courte durée, le groupe Wagner est présent depuis décembre 2021 au Mali. S’il constitue officiellement un soutien à la junte malienne dans sa lutte contre les groupes terroristes, le groupe s’est surtout distingué par les nombreuses exactions commises à l’encontre de la population civile, dont le massacre du village de Moura survenu en mars 2022 et où plus de trois cents personnes ont péri.

 

En parallèle, le groupe Wagner, via des sociétés écrans affiliées, mène depuis plusieurs années des opérations d’influence et de désinformation afin de déstabiliser les autorités en place dans plusieurs pays africains et les remplacer par d’autres favorables à sa cause, alimentant également le sentiment antifrançais. De telles actions ont notamment été repérée au Mali, au Burkina Faso, au Niger ou encore en Côte d’Ivoire. En outre, Evgueni Prigojine a cherché, via ses usines à trolls numériques, à influer sur les scrutins présidentiels américains de 2016 et français de 2017, notamment en relayant de fausses informations.

 

Estimées à 9 000 mercenaires tous pays confondus fin 2021, les forces employées par Wagner ont explosé à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie. Rien que dans ce pays, Wagner y aurait employé jusqu’à 50 000 soldats – dont 40 000 repris de justice. Son arsenal comprend désormais des chars d’assaut, des hélicoptères et des avions de combat. En Ukraine justement, Wagner prend une part active aux combats et est accusé de multiples crimes de guerre, tels que le bombardement de localités habitées, des actes de tortures et de violence sexuelle ou encore des exécutions sommaires, comme dans la tristement célèbre localité de Boutcha, au printemps 2022.

 

Cette entité, qui n’est pas signataire du Document de Montreux du 17 septembre 2008, qui traite des obligations juridiques des entreprises militaires et de sécurité privées pendant les conflits armés, a été sanctionnée par l’Union européenne dès 2021 et une nouvelle fois en 2023, mais continue malgré tout à s’étendre, menaçant la stabilité des pays et mettant en danger la vie de nombreux civils, tant ses opérations sont synonymes de morts et de violations des droits de l’homme.

 

Face aux multiples actions de déstabilisation opérées par le groupe Wagner au cours de sa décennie d’existence, il est important que les autorités françaises et européennes réagissent avec vigueur afin de contrer cette organisation qui opère sur un modèle de prédation et sur une stratégie de terreur systématique à l’encontre des populations civiles et de ses opposants. La France, qui a été particulièrement ciblée ces dernières années car elle représente un obstacle aux projets d’expansion agressive et de déstabilisation de Wagner, doit être à l’avant‑garde de la riposte contre cette entité.

 

Les exactions du groupe Wagner doivent être qualifiées pour ce qu’elles sont, c’est‑à‑dire des actes terroristes, en accord avec la définition du terrorisme adoptée par l’Union européenne depuis la décision‑cadre du Conseil de l’Union européenne du 13 juin 2002 et réaffirmée dans la directive (UE) 2017/541 du Parlement européen et du Conseil de l’Union européenne du 15 mars 2017. Celle‑ci pose en effet qu’un certain nombre d’infractions intentionnelles graves, telles que les atteintes à la vie d’une personne, peuvent être qualifiées d’infractions terroristes lorsqu’elles sont commises dans le but de gravement intimider une population, contraindre indûment des pouvoirs publics ou une organisation internationale à accomplir ou à s’abstenir d’accomplir un acte quelconque, ou gravement déstabiliser ou détruire les structures politiques, constitutionnelles, économiques ou sociales fondamentales d’un pays.

 

Cette proposition de résolution appelle ainsi notamment à inscrire l’entité militaire privée Wagner sur la liste de l’Union européenne des organisations terroristes. Grâce à cette inscription, les autorités des pays européens ainsi que leurs partenaires pourront imposer des mesures de contrôle et de sanction renforcées aux dirigeants, membres et soutien de cette entité militaire privée, en gelant ses avoirs, en limitant leurs déplacements internationaux ou encore en réprimant plus sévèrement leurs actions, afin de réduire au maximum le pouvoir de nuisance de cette organisation envers les institutions et les populations civiles.

 

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