Proposition de résolution pour une stratégie nationale de prévention sur le chemsex

Le « chemsex », comportement qui associe sexualité et usage de substances psychoactives stimulantes, semble se propager à une célérité inédite et inquiétante en France, en particulier chez les jeunes.

 

Cette pratique a pour principaux objectifs de faciliter, prolonger, et améliorer les rapports sexuels grâce aux effets psychoactifs des molécules consommées.

 

En France, on estime que le « chemsex » concernerait a minima 100 000 à 200 000 personnes.

 

Si elle est apparue il y a une quinzaine d’années, cette pratique se développe aujourd’hui de manière croissante, exposant les consommateurs à des dangers le plus souvent méconnus.

 

Les risques liés au « chemsex » sont multiples et sévères pour la santé physique et psychologique : psychoses, dépression, addiction, dépendance, incontinence temporaire ou définitive, etc.

 

Tout au long de la vie, ces comportements peuvent entraîner des pathologies aiguës et chroniques.

 

Lorsqu’elles ne sont pas prises par voie nasale ou en cachet, ces drogues de synthèse peuvent également être consommées par voie intraveineuse, entraînant parfois des abcès et plaies, des risques bactériens, ou encore une détérioration des veines, favorisant l’apparition de nécroses.

 

Certains des dommages sont irréversibles et peuvent même, lors de consommations en quantité importante, entraîner la mort.

 

Si la tragique et médiatique « affaire Palmade » a récemment fait connaître ce phénomène au grand public, les associations de lutte contre les infections transmises sexuellement (IST) et les médecins (addictologues, infectiologues et urgentistes) sont confrontés régulièrement et de plus en plus fréquemment aux dommages induits par la pratique du « chemsex » depuis plus de 10 ans.

 

Ces dernières années, on a pu penser que ces comportements ne concernaient qu’une catégorie isolée de Français urbains et favorisés.

 

Néanmoins et malgré des données incomplètes, force est de constater que la pratique du « chemsex » s’installe au sein de publics de plus en plus jeunes, venus de tous milieux et de tous les territoires.

 

L’accès à ces produits est facilité par la grande visibilité que leur offre Internet. Ainsi nos concitoyens, parfois mineurs, se procurent facilement les substances désirées en ligne ou dans des milieux festifs, sans en connaître la moindre composition, leur provenance ou les risques encourus.

 

Les substances utilisées appartiennent principalement à la famille des cathinones (3MMC, 4MEC, etc.) et celle des méthamphétamines (Vrystal, Met, Tina, etc.). En outre, il a été observé certaines de ces drogues sont en réalité des produits du quotidien et bon marché, détournés de leur usage par les consommateurs.

 

C’est le cas, par exemple, du GBL (gamma‑butyrolactone), un décapant chimique pour les jantes utilisé dans les garages. Coupé avec de l’eau, il devient un puissant euphorisant.

 

Si le « chemsex » se concentre encore dans les grandes métropoles, les villes moyennes et communes rurales sont désormais également concernées en raison d’une diversité des substances accessibles un clic. L’usage des applications de rencontre fait également de ces sites une nouvelle plateforme de diffusion du « chemsex », et isole d’autant plus les consommateurs en détresse.

 

L’étendue du phénomène est telle que certains jeunes ne conçoivent plus leur sexualité en dehors du « chemsex ».

 

Par ailleurs, alors que cette pratique était principalement localisée chez les hommes ayant des rapports sexuels avec un ou d’autres hommes (HSH), elle, s’est, en quelques années étendue progressivement aux personnes hétérosexuelles.

 

Compte tenu de la diversité des cas rencontrés et souvent par manque de temps ou de moyens humains, les centres de dépistage et centres d’addictologie n’ont pas la capacité de gérer et prendre en charge les « chemsexers » en souffrance en proposant des parcours de soin adaptés.

 

Avec le « chemsex », la France fait face à un problème de santé publique. En témoignent les signaux inquiétants recueillis par les services de maladies infectieuses ou services d’addictologie, et les centres d’addictovigilance. En outre, le manque d’études et de recul scientifique sur l’ampleur du phénomène, notamment sur les particularités des différentes populations et milieux touchés et le caractère tabou et la méconnaissance du sujet limitent les possibilités d’intervention des décideurs publics.

 

Sans intervention résolue de l’État en la matière, la situation risque de devenir incontrôlable et poser un problème de santé publique majeur.

 

Dans ce contexte, la présente proposition de résolution appelle les pouvoirs publics à construire une politique nationale permettant de lutter efficacement contre les dangers sanitaires et sociétaux (risque épidémiques VIH/VHC et désinsertion sociale) et les risques individuels du « chemsex ».

 

Il s’agit donc d’identifier le phénomène dans ses formes actuelles, informer le grand public des risques pour la santé, en particulier les jeunes, et soutenir l’ensemble des acteurs de terrain impliqués dans la prise en charge des « chemsexers ».

 

La feuille de route santé sexuelle 2021 – 2024 du ministère de la santé avait pour ambition de mettre en place une série de mesures de prévention et de formation au sein des structures sanitaires.

 

Pour autant, l’étendue et la dangerosité du phénomène appelle à une action plus rapide et résolue de l’État, sur le plan logistique, humain et financier.

 

Une politique nationale devra être déclinée dans chaque territoire avec l’appui des agences régionales de santé et des collectivités, afin de construire les réponses les plus adaptées, selon les besoins locaux.

 

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